La faune non-indigène
Depuis des siècles l’Homme tente d’enrichir la faune et la flore de certaines régions ;et ce phénomène est particulièrement frappant lorsqu’on observe la biodiversité des milieux dulçaquicoles français :sur les 82 espèces de poissons français , 55 ont été introduites !
POURQUOI ?
Pourquoi introduire de nouvelles espèces ? Nous venons de le dire : il n’existe que 27 espèces françaises autochtones : la 1ère motivation fut donc d’enrichir la faune française (notamment pour avoir à notre disposition une source de nourriture plus importante). D’autres introductions ont pour but « d’embellir » nos bassins de jardin ou nos aquariums en introduisant des espèces ornementales, qui sont ensuite relâchées . La lutte biologique, elle aussi, est une cause d’introduction. Enfin il y a les introductions involontaires (ex :espèces élevées en milieux clos qui réussissent à s’échapper, etc.)
LES ESPECES INVASIVES
Le POISSON-CHAT (Ictalurus melas et Ictalurus nebulosus)
Ils sont originaires d’Amérique du nord. Introduits vers la fin du 19ème s. , il se sont échappés d’un laboratoire de Paris et ont colonisé la Seine. Nebulosus ne s’est pas maintenu, mais melas a colonisé le reste de la France. Cette espèce a en effet des capacités d’adaptation étonnante : il survit dans des eaux à 36° , sans oxygène, avec un taux de nitrate énorme, et se nourrit de n’importe quoi (invertébrés, mais aussi algues, têtards, œufs et alevins d’autres poissons). Les autres prédateurs, quand à eux, rechignent à manger cette espèce car elle possède des aiguilles sur les nageoires dorsales et pectorales, et les jeunes se regroupent pour former des « boules d’alevins » que les prédateurs prennent pour un prédateur encore plus gros !
Le SILURE GLANE (Silurus glanis)
C’est un cousin du poisson-chat. C’est aussi le plus grand carnassier aquatique de France (le record étant de 5m dans le Danube et 2m20 en France) ! Il est naturellement présent dans la vallée du Rhône, mais il a été introduit en Alsace au 19ème s. et, sur quasiment tout le territoire au siècle dernier. Sa présence dépend donc en partie, et non pas entièrement, de l’homme. Ce prédateur, du fait de sa taille, peut avaler des proies telles que des batraciens, des oiseaux d’eau et de petits mammifères ! On l’a même nommé « mangeur d’enfants » au 16ème s. et « croqueur de petits chiens du bois de Boulogne au 20ème ! En réalité, il a une alimentation plutôt bentophage. Il peut supporter une température de 3 à 30° et un faible taux d’oxygène. Il est nocturne.
La PERCHE SOLEIL (Lepomis gibbosus)
Espèce nord américaine introduite dans les années 1880. Comme le poisson chat, elle possède de grandes facultés d’adaptation, et peut supporter une faible teneur en sel. Elle mesure jusqu’à 15cm et peut peser 110g.
La CARPE (Cyprinus carpio)
Et oui, elle aussi a été introduite! Mais il faut dire que cette introduction date de l’époque romaine, alors que le concept d’écologie n’existait pas. Plus tard, cette source de nourriture originaire d’Eurasie fut élevée par les moine. Aujourd’hui, on peut dire qu’elle s’est bien adaptée sans causer de dégâts majeurs (le seul bémol étant la turbidité de l’eau lorsqu’elles fouillent dans la vase). Elle peut atteindre 1,20m pour 40kg et, elle est très appréciée par les pêcheurs. Une de ses caractéristiques est sa durée de vie : jusqu’à 50ans !
La GAMBUSIE (Gambusia holbrooki)
De la famille des poecilidae, elle ressemble beaucoup au guppy, si ce n’est qu’elle est grisâtre, plus grande(4cm pour le mâle,8 pour la femelle),et surtout beaucoup plus agressive ! Elle fut introduite dans le but de limiter les populations de moustiques (elles raffole en effet de leur larves) . Première constatation : sa présence n’a quasiment aucun effet sur le nombre de ces insectes…Deuxième constatation : son expansion sur les côtes du pourtour méditerranéen (Espagne, France, Italie, Corse) a eu des effets indésirables tels que, la quasi-disparition de Valencia hispanica et la forte régression de Aphanius iberus et A.fasciatus, 3 killies européens partageant la même niche écologique. Cependant, dans certaines zones comme les côtes de Vendée et d’Aquitaine, ce poisson a eu un impact moins important.
La GRENOUILLE TAUREAU (Rana Catesbeiana)
Cet amphibien nord-américain a été ramené des USA en 1968 par un particulier pour son bassin ornemental, en Gironde. De plus, des individus auraient peut-être été vendu en animalerie à une certaine période. Son atout majeur est sa taille : 15 à 20cm du museau au cloaque, 40cm pattes étendues, pour un poids de 500 à 750g ! C’est ainsi qu’elle peut s’attaquer à de grosses proies comme des mammifères, des oiseaux, des serpents ou d’autres grenouilles de petite taille. Elle représente donc non seulement une concurrente pour les autres espèces(puisqu’elle se nourrit aussi d’invertébrés),mais surtout un nouveau prédateur. Les têtards sont végétariens. Elle est visiblement plus présente chez-nous que dans les autres pays européens concernés(Espagne, Royaume-Uni, Belgique, Hollande, Allemagne, Corse, Italie et Grèce).
La TORTUE DE FLORIDE (Trachemis scripta elegans)
Ce reptile est devenu tristement célèbre après que des particuliers irresponsables ont commencé à en relâcher dans la nature ; ils avaient le plus souvent acheté des individus jeunes, qui à cet âge ne mesurait que 4 ou 5 cm et était donc parfait comme cadeaux pour leurs enfants. Tout aurait pu bien se terminer si cette espèce n’atteignait pas à l’âge adulte 30cm de long…Les pauvres bêtes se sentant à l’étroit dans leurs haricots, leurs propriétaires durent trouver un moyen de s’en séparer. Vous connaissez la suite : les tortues américaines firent concurrence à nos cistudes européennes, et celles-ci se retrouvèrent sérieusement menacées. Heureusement le commerce de tortues du genre Trachemis est désormais interdit en France. Elle est aussi appelée « tortue à tempe rouge ».Comme beaucoup de chéloniens, elle a une longue durée de vie :entre 50 et 75 ans.
Les ECREVISSES (Orconectes limosus et Procambarus clarkii)
Comme pour la faune piscicole, les écrevisses françaises sont désormais largement supplantées par les espèces étrangères .Orconectes limosus a été introduite il y a plus d’un siècle et a apporté en France un champignon qui a décimé les espèces indigènes ;Procambarus clarkii, quand à elle, est pour l’instant cantonnée au Sud de la France
Le RAGONDIN ( Myocastor coypus) et le RAT MUSQUE (Ondatra zibethicus)
Ils furent tous les deux importés pour leur fourrure, le 1er d’Amérique du Sud, le 2ème d’Amérique du Nord, vers la fin du 19ème . Ayant réussi à s’échapper des élevages, ils ont ensuite pu coloniser toute l’Europe. Ils causent des dégâts aux berges en détruisant la végétation et en creusant leur terrier .
Ceci n’est qu’un échantillon de toutes les espèces introduites en France et en Europe depuis longtemps, et encore, il ne représente que les espèces animales… Beaucoup d’autres « apports » à la biodiversité locale ont eu lieu, je compléterais donc régulièrement cet article au fil du temps.
© Textes : pleco3 pour AQUA débutant